Rupture conventionnelle : ce que vous devez absolument savoir en 2025

Ce que les employeurs doivent savoir sur les nouvelles règles, les coûts cachés et les risques juridiques d’une rupture conventionnelle.

La rupture conventionnelle est aujourd’hui le mode de séparation le plus utilisé dans les entreprises françaises pour mettre fin à un contrat à durée indéterminée (CDI). En 2023, près d’un demi-million de ruptures conventionnelles ont été homologuées par l’administration. Si ce mécanisme séduit autant, c’est parce qu’il combine simplicité, sécurité juridique et ouverture aux droits chômage pour le salarié. Toutefois, la réforme entrée en vigueur au 1er septembre 2023 a profondément modifié son traitement social, notamment pour les employeurs. Dans cet article, nous vous expliquons tout ce qu’il faut savoir sur la rupture conventionnelle : conditions, indemnité, fiscalité, cotisations sociales, risques, et bonnes pratiques.

Qu’est-ce qu’une rupture conventionnelle ?

La rupture conventionnelle est un dispositif permettant à l’employeur et au salarié de mettre fin d’un commun accord à un contrat de travail à durée indéterminée. Ce mécanisme, introduit par la loi du 25 juin 2008, offre une alternative aux procédures plus conflictuelles comme la démission ou le licenciement.

Les avantages :

  • Pour le salarié : droit à l’indemnité spécifique + droit au chômage
  • Pour l’employeur : procédure simple et rapide, sécurité juridique

Qui peut bénéficier d’une rupture conventionnelle ?

Seuls les salariés en CDI peuvent en bénéficier, peu importe leur poste, leur ancienneté ou leur temps de travail (temps plein ou partiel). Les apprentis, stagiaires, CDD ou intérimaires ne sont pas concernés.

Pas de quota officiel… mais des limites à respecter

Contrairement à certaines idées reçues, il n’existe pas de quota maximum de ruptures conventionnelles par entreprise. Toutefois, la DREETS (Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités) peut refuser une demande si elle soupçonne une manœuvre destinée à éviter un plan social déguisé.
En pratique, si plus de 10 ruptures conventionnelles sont conclues sur 30 jours, cela peut être assimilé à un licenciement collectif nécessitant un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).

L’indemnité de rupture conventionnelle : comment est-elle calculée ?

Un minimum légal à respecter

L’indemnité versée au salarié ne peut pas être inférieure à :

  • L’indemnité légale de licenciement, OU
  • L’indemnité prévue par la convention collective, si elle est plus favorable.

Calcul de l’indemnité légale :

Elle se calcule selon l’ancienneté du salarié :

  • 1/4 de mois de salaire* par année jusqu’à 10 ans,
  • 1/3 de mois de salaire* par année au-delà.

*Salaire de référence :

  • Moyenne mensuelle des 12 derniers mois précédant la rupture, ou
  • Moyenne mensuelle des 3 derniers mois, primes comprises au prorata.
    On retient la formule la plus avantageuse pour le salarié.

Cette indemnité peut bien sûr être négociée à la hausse en fonction de l’ancienneté du salarié, du niveau de rémunération, du contexte de départ, de la qualité de la relation entre les parties, ou encore des risques juridiques liés à un éventuel licenciement.

Une indemnité trop proche du strict minimum légal peut être refusée par le salarié. Il peut :

  • Refuser de signer la convention,
  • Ou la contester après homologation, voire
  • Saisir le conseil de prud’hommes si la rupture lui semble déséquilibrée.

Le traitement fiscal et social de l’indemnité

Exonération d’impôt sur le revenu

L’indemnité de rupture conventionnelle est exonérée d’impôt dans la limite la plus élevée entre :

  • L’indemnité légale ou conventionnelle
  • Le double du salaire annuel brut
  • 50 % de l’indemnité totale versée

Plafond absolu : 6 fois le PASS (Plafond Annuel de la Sécurité Sociale), soit 282 600 € en 2025.

⚠️ Cas particulier : départ en retraite

Si le salarié est éligible au départ à la retraite, l’indemnité est entièrement imposable.

Réforme du 1er septembre 2023 : un régime social harmonisé

Avant cette date, le régime social variait selon que le salarié était ou non en droit de partir à la retraite. Désormais, les règles sont uniformisées, et la fiscalité est alourdie pour l’employeur.

Ce qui change :

Avant le 1er sept. 2023Après le 1er sept. 2023
Forfait social de 20 % sur la part exonéréeContribution employeur de 30 %
Différence de régime selon l’éligibilité retraiteRégime uniformisé pour tous
Exonérations partielles jusqu’à 2 PASSMaintien de l’exonération dans la limite de 2 PASS

Conséquence : la rupture conventionnelle coûte désormais plus cher à l’employeur, ce qui peut inciter certaines entreprises à revoir leur stratégie de séparation.

Le coût total pour l’employeur

Composants à anticiper :

  • Indemnité de rupture (négociée)
  • Contribution employeur de 30 %
  • CSG/CRDS éventuellement dues
  • Éventuelles charges en cas de dépassement des seuils d’exonération

Bon à savoir : si l’indemnité excède 10 PASS, elle devient entièrement assujettie aux cotisations sociales dès le premier euro.

Incidence sur les droits au chômage

C’est l’un des grands avantages de la rupture conventionnelle : elle ouvre droit à l’allocation chômage, contrairement à une démission simple.

Cependant, France Travail (anciennement Pôle emploi) n’indemnise pas immédiatement le salarié. Plusieurs délais de carence peuvent s’appliquer, cumulativement.

Les trois types de carence France Travail :

1. Délai d’attente légal (incompressible)

  • 7 jours
  • S’applique à tous les demandeurs d’emploi, quelle que soit la cause de la rupture.

2. Carence liée aux congés payés

  • Si le salarié perçoit une indemnité compensatrice de congés payés, France Travail applique une carence équivalente au nombre de jours de congés payés non pris.

3. Différé spécifique d’indemnisation

  • Lorsqu’une indemnité supra-légale est versée (au-delà du minimum légal ou conventionnel), un différé supplémentaire s’applique.
  • Formule :
    Montant de l’indemnité supra-légale ÷ 109.6 (valeur au 1er janvier 2025)

Exemple : une indemnité de 10 960 € au-delà du minimum entraîne :
10 960 ÷ 109.6 = 100 jours de carence supplémentaires.

Plafond maximum : 150 jours (soit environ 5 mois).

👉 Ce qu’il faut retenir :

  • Le délai total de carence peut facilement dépasser 2 à 3 mois, surtout si l’indemnité négociée est élevée.
  • Le salarié n’est pas indemnisé pendant cette période, il est donc essentiel d’anticiper financièrement cette phase de transition.

Attention au formalisme et aux fraudes

Une convention de rupture mal rédigée ou un paiement différé peut entraîner l’invalidation de la rupture par l’administration ou les prud’hommes.

Points de vigilance :

  • Signature de la convention après un entretien obligatoire
  • Respect du délai de rétractation de 15 jours
  • Homologation par la DREETS dans un délai de 15 jours ouvrables
  • Versement effectif de l’indemnité à la date prévue

Une rupture déguisée ou contrainte (pression sur le salarié) peut être requalifiée en licenciement abusif.

Faut-il toujours accepter une rupture conventionnelle ?

Pour le salarié :

Avantage : indemnité + chômage
Inconvénient : renoncement à toute contestation (sauf vice de consentement)

Pour l’employeur :

Avantage : fin amiable du contrat
Inconvénient : coût plus élevé depuis 2023

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FAQ – Rupture conventionnelle

Oui. La rupture conventionnelle repose sur un accord mutuel. Ni l’employeur ni le salarié ne peut l’imposer à l’autre partie.

Il n’y a pas de préavis légal. Cependant, les parties peuvent fixer une date de rupture d’un commun accord, souvent au terme d’un délai de 1 à 2 mois, incluant l’homologation.

Oui, c’est possible. Toutefois, le consentement du salarié ne doit pas être vicié. L’administration et les juges examinent attentivement ce type de situation.

En théorie, oui. Mais la prudence s’impose car toute pression exercée sur une salariée enceinte ou en congé parental pourrait être requalifiée en rupture forcée.

Oui. Il dispose d’un délai de 12 mois à compter de l’homologation pour saisir le conseil de prud’hommes en cas d’irrégularité ou de vice du consentement.

Oui, mais l’autorisation préalable de l’inspection du travail est obligatoire. Sans cette autorisation, la rupture est nulle.

Elle est partiellement exonérée d’impôt dans la limite de certains plafonds. Elle devient entièrement imposable si le salarié est en droit de partir à la retraite.

Depuis septembre 2023, l’employeur verse une contribution spécifique de 30 % sur la part exonérée de cotisations. Certaines indemnités peuvent aussi être soumises à la CSG/CRDS.

Oui. Tant que le montant est au moins égal au minimum légal ou conventionnel, il peut être librement négocié entre les parties.

Le barème Macron fixe les montants minimaux et maximaux d’indemnisation que peut accorder un conseil de prud’hommes en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, en fonction de l’ancienneté du salarié.
👉 Il sert donc de référence pour estimer le risque financier d’un contentieux et peut être utilisé comme base de discussion lors de la négociation d’une indemnité de rupture conventionnelle.

Oui. C’est l’un des grands avantages du dispositif. Le salarié perçoit l’ARE, après application des éventuels délais de carence.

Plusieurs carences peuvent s’appliquer : 7 jours d’attente, carence liée aux congés payés, et différé spécifique en cas d’indemnité supra-légale (jusqu’à 150 jours max).

Oui, mais si plus de 10 ruptures sont conclues sur 30 jours, la DREETS peut considérer qu’il s’agit d’un plan social déguisé, et refuser l’homologation.

Oui, mais le salarié est libre de refuser. L’absence de consentement mutuel empêche la rupture conventionnelle.

Oui, pendant un délai de rétractation de 15 jours calendaires suivant la signature.

Oui, depuis 2020 pour les agents titulaires et contractuels. La procédure est spécifique et l’indemnité est fixée selon un barème propre au secteur public.

C’est fortement déconseillé. L’administration peut y voir une tentative de régularisation abusive d’une situation irrégulière, voire une fraude.

Oui. Si une telle clause est prévue dans le contrat de travail ou négociée dans la convention, elle doit prévoir une contrepartie financière.

Oui, en cas de vice du consentement, fraude, ou non-respect de la procédure (absence d’entretien, non-respect du délai de rétractation, défaut d’homologation…).

Après signature, elle reste valable le temps que l’administration se prononce sur l’homologation (15 jours ouvrables max). Passé ce délai sans réponse, elle est réputée homologuée.

Non. L’indemnité n’est pas soumise aux cotisations retraite dans la limite des exonérations sociales (2 PASS).

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